L’idée qu’il existerait des groupes de pression juifs dans des pays occidentaux avec des objectifs non fondamentalement reliés, voire en interférence, avec ceux des Etats dont ils sont les citoyens peut sembler être une idée antisémite. Surtout si on ajoute que ces organisations agissent en faisant profil bas, c’est-à-dire en coulisses même si certains voudraient qu’elles interviennent de manière bien plus directe et ferme dans le débat public.
C’est pourtant ce genre d’idées qu’expose un certain Isi (dore) Leibler dans un édito du Jerusalem Post où il déplore le profil bas adopté par les dirigeants communautaires Juifs en Angleterre..
En fait il parle surtout d’Anglo-Juifs, c’est-à-dire qu’il définit le judaïsme comme une appartenance nationale située sur le même plan que l’appartenance à la nation anglaise. Pour bien comprendre, imaginez les étranges attelages que constitueraient des termes comme Anglo-Protestant, Anglo-Catholique, Anglo-Anglican ou Anglo-Musulman.
Toute la supercherie sioniste est là : on reproche à un peuple, anglais par exemple, d’être plus ou moins antisémite par son refus de voir dans ses membres juifs des membres à part entière de la communauté nationale. Tout en revendiquant par ailleurs haut et fort une appartenance nationale juive distincte qui existerait depuis Abraham ou Moïse et qui a dû s’insérer dans un certain nombre d’autres pays en raison d’un exil qui aurait constitué une diaspora.
C’est-à-dire que le Goy qui adopte la définition du juif telle que proposée par les sionistes ne peut et ne saurait être qualifié autrement que comme un antisémite.
Parce que la base du sionisme est là : les Juifs constituent une nation séparée qui a vocation à retourner dans sa patrie d’origine, c’est-à-dire l’entité sioniste. Et le devoir de tout Juif partout dans le monde est d’aider moralement et matériellement cette même entité sioniste et de contribuer à ce prétendu retour.
Et haro sur ceux qui seraient trop tièdes dans cet exercice comme celui cité en exemple par Isi Leibler qui le tire d’un roman d’Howard Jacobson: qui « fait le portrait d’un Juif Britannique qui cherche à fuir ses origines juives et à « s’intégrer » en se tournant contre son propre peuple ».
Son propre peuple, vous l’aurez compris sans avoir à faire appel aux techniques d’exégèse, n’est pas le peuple britannique….
par ISI LEIBLER, Jerusalem Post (Sionistan) 18 juin 2011 traduit de l’anglais par Djazaïri
La jeune génération aura sans doute du mal à faire la différence entre faire profil bas et ramper.
Le leadership anglo-juif est à nouveau sous les projecteurs après sa réaction face à la conduite récente du premier ministre Britannique David Cameron.
Aujourd’hui, toute communauté juive engagée dans des tractations avec un gouvernement se sent interpellée par le besoin d’équilibrer diplomatie silencieuse et action ouvertement publique. Même le leadership américano-juif, qui se targue d’une action publique vigoureuse, fait face à un dilemme quant à la manière de réagir au conflit entre le président Barack Obama et le premier ministre Benjamin Netanyahou.
Mais la communauté juive en Angleterre a une longue tradition qui lui est propre de garder délibérément un profil bas, vantant même l’efficacité d’une action juive basée sur le « chuchotement » plutôt que les « cris ».
Le problème est exacerbé par le statut accordé aux Juifs anti-Israël, qui sont de plus en plus cités favorablement dans les media grand public et se voient fréquemment mis plus en évidence que le leadership juif.
En outre, il existe une tendance croissante, consciente ou non, chez des Juifs de plus en plus nombreux, à s’aligner sur une mode antisioniste afin de ne pas être pris sous le feu de l’anti-israélisme de plus en plus répandu qui sature tous les niveaux de la société. Ce processus est brillamment présenté dans The Finkler Question, le roman d’Howard Jacobson qui lui a valu le Booker Prize en 2011 et fait le portrait d’un Juif Britannique qui cherche à fuir ses origines juives et à « s’intégrer » en se tournant contre son propre peuple.
En novembre dernier, avec une hostilité contre Israël dans les media britanniques atteignant son niveau le plus élevé de tous les temps, cette tendance a atteint son paroxysme quand Mick Davis, président de l’United Jewish Israel Appeal (UJIA) a exhorté publiquement les Juifs Britanniques à être plus critiques à l’égard d’Israël, et a fait un certain nombre de déclarations bizarres condamnant les politiques sécuritaires israéliennes. L’affaire avait été évoquée dans un éditorial du Jerusalem Post que j’avais rédigé plus tôt dans l’année.
Cela va sans dire, aucune personne sérieuse ne conteste le droit des Juifs de la diaspora à critique certains aspects d’Israël ou à condamner les défaillances morales d’Israéliens engagés dans la vie publique. Cependant, récemment encore, il était considéré comme répréhensible de la part de Juifs résidant hors de l’Etat juif d’exercer des pressions en relation avec des politiques sécuritaires qui pourraient être des questions de vie ou de mort pour des citoyens Israéliens.
Aucune autre communauté juive, celle des Etats Unis comprise, dont les Juifs sont considérés comme bien plus libéraux que leurs homologues Britanniques, ne tolérerait de tels débordements de la part d’un prétendu leader d’un courant dominant. Après tout, Davis est à la tête de l’UJIA, pas un porte parole de J-Street.
C’est dans un tel contexte instable que les leaders bien intentionnés du Bureau des Députés [juifs] tâtonnent pour des solutions. Mais hélas, leur obsession de la nécessité de garder un profil bas, de ne pas faire de vagues ainsi que leur détermination à éviter les confrontations, tendent à accréditer les accusations selon lesquelles ils sont souvent perçus comme des « Israélites tremblants. »
Avec BICOM – un organisme généreusement subventionné avec pour mission de promouvoir le soutien à Israël – ils sont tout le temps sur la défensive, cherchant désespérément à prouver leur bonne foi la gauche [politique], consacrant plus d’efforts contre des organisations fascistes marginales que contre la bien plus grande menace que sont les Arabes et les extrémistes indigènes anti-israéliens.
Ils s’adonnent également excessivement aux condamnations rituelles contre l’islamophobie, mais sont réticents à confronter les dirigeants de la communauté musulmane pour leur non condamnation du terrorisme et de l’extrémisme dans leurs propres rangs.
Dans les universités, la situation continue à empirer.
Des campagnes pour promouvoir le boycott, le désinvestissement et des sanctions contre Israël sont à l’ordre du jour. De nombreux étudiants Juifs sont intimidés par l’agressivité et la violence des Arabes et des gauchistes pro-palestiniens.
Pourtant, même dans ces situations, les dirigeants appellent à la “retenue.”
Il y a quelques mois, un étudiant Juif qui distribuait des tracts en faveur d’Israël avait été brutalement agressé, frappé au visage et hospitalisé. Au lieu de le soutenir, le directeur exécutif du Jewish Leadership Council avait affirmé que l’étudiant avait cherché ce qui lui était arrivé : « S’ils cherchent des ennuis, il ne faut vraiment pas qu’ils soient surpris si ce genre de chose arrive, » avait-il dit.
Le gouvernement britannique conservateur semble être encore plus hostile à Israël que son prédécesseur travailliste. En mars de cette année, Cameron a prononcé un important discours devant la communauté juive, vantant ses contributions et condamnant l’antisémitisme, affirmant que ses convictions pour Israël étaient indestructibles, allant même jusqu’à se présenter comme un sioniste. Cependant, même s’ils chantent des mantras sur leur amitié supposée pour l’Etat juif, lui et le ministre des affaires étrangères William Hague sont connus pour être à la pointe du bloc européen anti-israélien. Ce qui a été illustré par la récente décision de Cameron d’en finir avec la tradition séculaire des premiers ministres Britanniques figurant dans le comité de parrainage du Fonds National Juif. Cette décision venait en réponse à des campagnes intenses de pressions de la part d’organisations arabes et anti-israéliennes qui avaient lancé, sans succès, la « Stop the JNF Campaign » (stop au Fonds national Juif).pendant le mandat de Gordon Brown. Alors qu’elle avait d’abord prétendu que la décision avait été prise pour alléger la charge de travail de Cameron, la Jewish Chronicle a rapporté par la suite qu’un porte parole du bureau du premier ministre avait confirmé que la raison de son retrait était le lien de Fonds national Juif avec Israël. Le rédacteur en chef de la Jewish Chronicle était allé jusqu’à présenter la décision du premier ministre comme « l’équivalent d’un bras d’honneur à la communauté juive de Grande Bretagne. »
A l’exception d’une déclaration de la Fédération Sioniste et de la branche britannique du Fonds National Juif, les leaders Anglo-Juifs ont réagi à et affront par un silence assourdissant.
Pourtant, à vrai dire pour la forme, Davis de l’UJIA et son collègue Gerald Ronson, président du CST (Community Security Trust) – l’organisation crée pour combattre l’antisémitisme – se sont exprimés la semaine dernière. Ils se sont immédiatement dissociés de la décision par le Fonds national Juif de Grande Bretagne, capitulant ainsi sous la pression des organisations extrémistes anti-israéliennes. Dans ce qu’on peut qualifier comme de la soumission, ils ont donné une complète absolution à Cameron, présentant comme « ridicule » l’idée que cette « décision de démissionner [de la fonction de parrain] avait un quelconque rapport avec les pressions des organisations anti-israéliennes ou reflétait une vision négative d’Israël » parce que le premier ministre est un « ami fidèle » d’Israël.
Aujourd’hui, certains Juifs Britanniques issus de la base – et même quelques uns parmi les dirigeants – en ont assez de cette attitude de leurs portes parole qu’ils accusent d’être dans le déni et de trop minimiser l’ampleur de l’antisémitisme. Ils exigent des réponses plus vigoureuses aux attaques anti-juives et anti-israéliennes.
Ce qui s’est traduit par des protestations des représentants de la base au plenum du Conseil des Députés et l’adoption d’un ton plus combatif par la Fédération Sioniste.
La “British Coalition for Israel,” une nouvelle organisation vouée à l’origine à la promotion du soutien à Israël, a reçu l’appui enthousiaste de larges sections de la communauté.
En dépit de l’escalade du niveau d’antisémitisme au Royaume Uni, la première bataille doit être de s’assurer que la nouvelle génération de dirigeants qui émergera de l’intérieur de la communauté juive aura le courage et la conviction nécessaires pour tenir bon et défendre ses intérêts.
Si ceux qui adoptent la politique de l’autruche et évitent d’affronter les forces qui diabolisent et délégitiment Israël l’emportent, cela aura un impact catastrophique sur les jeunes dont la confiance en soi est sapée par l’observation de leurs aînés se précipitant aux abris. Si les calomnies antisémites et anti-israéliennes ne sont pas combattues, la jeune génération absorbera la version palestinienne mensongère du conflit israélo-arabe, qui présente Israël comme un Etat voyou, né de manière illégitime, occupant un territoire arabe et niant les droits fondamentaux des palestiniens.
Cet article est l’adaptation de propos tenus lors d’une session conjointe du Sassoon International Center for the Study of Anti-Semitism et l’University College London Israel Alumni Association le 16 juin.