Assad, c'est fini (?) ou le crime d'un prix Nobel de la paix
Si vous
le souhaitez, vous pouvez lire mon commentaire après cet article du Guardian.
Les puissances extérieures, Russie et Etats
Unis en particulier doivent envisager de relancer des discussions si on veut
éviter la ruine du pays.
Editorial, The Guardian (UK) 27 juillet 2012 traduit de l'anglais par Djazaïri
La décision du président Obama d’appeler l’an
dernier à la chute du régime d’Assad, appel qui sera repris par la Grande
Bretagne et d’autres alliés, a été, on peut l’affirmer, une erreur. Les raisons
d’Obama étaient compréhensibles. Premièrement, le régime se comportait de
manière effroyable. Deuxièmement, les Etats Unis ne voulaient pas rester à la
traîne dans une autre phase du Printemps arabe, étant donné en particulier que
le régime de Damas était, à la différence de celui de Moubarak en Egypte, un de
ceux qu’il a toujours détesté et qui est lié aux ennemis des Etats Unis dans la
région que sont le Hezbollah et l’Iran. Troisièmement, Israël était favorable à
tout ce qui pouvait affaiblir la Syrie et nuire à l’Iran, un sentiment partagé
par l’Arabi saoudite et d’autres pays du Golfe. Quatrièmement, Obama et ses
conseillers avaient sans doute la conviction que Assad s'en serait allé bien avant
le moment où il aurait pu faire partie d’une quelconque solution. C’était
pourtant une chose de croire que Assad, sa famille et ses associés seraient à un
moment donné contraints de s’en aller, et autre chose de le dire publiquement sur
un ton irrévocable.
Le résultat malheureux a été de couper court à toute possibilité de
négociations entre les protagonistes et de claquer la porte à une coopération
étroite entre les Etats Unis et la Russie, les deux pays qui pourraient en
théorie, s’ils agissaient ensemble, faire la différence pour un résultat en
Syrie. On peut bien entendu soutenir que le régime syrien a rejeté toute suggestion
laissant entendre qu’il devrait discuter avec ceux qu’il qualifie de
terroristes, et que c’est ce qui a bloqué le plan Annan dès le début. Mais le
temps, et le désespoir, ont peut-être changé les choses. Le régime d’Assad est maintenant
dans une situation différente et pire qu’il
y a quelques mois. Oui, mais pourquoi le régime devrait accepter des
discussions su sa propre liquidation est le premier thème de l’agenda ? De
la même manière, pourquoi des organisations d’insurgés envisageraient-elles un
quelconque compromis alors qu’elles se rendent compte que les puissances
occidentales ainsi que de nombreux gouvernements de la région sont derrière
elles ? Et enfin, pourquoi la Russie devrait-elle se satisfaire d’une
politique de changement de régime en Syrie, prêtant ainsi le flanc à l’accusation
de laisser tomber un allié tout en se rendant elle-même complice d’un plan, c’est
certainement ainsi que Vladimir Poutine voit les choses, qui vise à réduire l’influence
et le prestige de la Russie au Moyen Orient ?
Comme plus personne ne peut avancer sur le terrain
diplomatique, la flamme guerrière a été attisée au point qu’elle risque de
ruiner un pays de 24 millions d’habitants. Aujourd’hui, Alep, une charmante
ville historique qui avait largement été épargnée jusqu’à présent, est
peut-être sur le point d’être écrasée. Le conflit, soyez-en assuré, déchire aussi
le tissu social de la Syrie. Non seulement les relations entre les sectes et
les confessions, mais aussi celles entre les classes sociales, avec une
paysannerie souvent militarisée qui rejoint, et souvent dirige, le combat. La possibilité
que des extrémistes, al Qaïda et d’autres, tenteront de s’immiscer est
évidente. Les tristes nouvelles qui nous arrivent d’Irak, où une nouvelle série
d’attentats a tué de nombreuses personnes, suggèrent que les extrémistes
sunnites pourraient être en train d’élaborer un front commun dans le but de
restaurer une domination sunnite dans les deux pays. Tout cela augure très mal
de l’avenir, y compris un éventuel avenir sans Assad.
Il y a encore ceux qui, comme la petite mais
courageuse opposition syrienne non violente, qui pensent qu’il existe une autre
voie, ainsi que nous le rappelle une déclaration après une réunion récente de
Sant’Egidio à Rome. Les puissances extérieures ont deux options désormais. L’une
est de rester spectateur pendant que la Syrie brûle, avec certains gouvernements
qui soutiennent les rebelles en leur livrant des armes et attendent des
défections, des assassinats ou des mutineries dans les forces armées pour
abattre le régime. Si nous pouvions être assurés que cela va se produire rapidement,
ce serait une chose. Mais que se passera-t-il si Assad continue à tenir ?
Pendant des semaines, des mois voire même plus longtemps ? C’est pourquoi
la deuxième option, un retour à la diplomatie et en particulier, une relance du
traitement de ce terrible problème par l’Amérique et la Russie, doit absolument
être prise en considération. Sont-ils sur des positions inflexibles, ou trop
impuissants devant les conséquences de leurs propres décisions pour dseulement
essayer ? Si c’est le cas, ils porteront une lourde responsabilité.
Commentaire:
Le journal anglais The Guardian est peut-être en train de tourner casaque sur la Syrie. Alors que depuis le début des troubles dans ce pays, il a été vigoureusement anti-gouvernement syrien, voilà qu’il demande en quelque sorte comment on en est arrivé là en Syrie, avec un pays au bord de la ruine totale, des milliers de morts et de nombreux réfugiés, entre les déplacés de l’intérieur et ceux qui sont à l’étranger..
Le journal anglais The Guardian est peut-être en train de tourner casaque sur la Syrie. Alors que depuis le début des troubles dans ce pays, il a été vigoureusement anti-gouvernement syrien, voilà qu’il demande en quelque sorte comment on en est arrivé là en Syrie, avec un pays au bord de la ruine totale, des milliers de morts et de nombreux réfugiés, entre les déplacés de l’intérieur et ceux qui sont à l’étranger..
The
Guardian parle clairement de la responsabilité de Barack Obama et de ses
suiveurs habituels (en France Nicolas Sarkozy, puis François Hollande).
Effectivement,
ainsi que le reconnaît l’éditorial, en fixant comme préalable le départ du chef
de l’Etats syrien, les Etats Unis et leurs amis ont bloqué toute possibilité d’avancer
de manière négociée vers une solution de la crise.
Tout
bonnement parce que ce préalable est évidement inacceptable, et même Laurent
Fabius le sait bien. Tout comme les prétendus rebelles qui ont bien compris que
l’occident et les monarchies (démocratiques) du Golfe en posant ce préalable
les encourageaient à adopter une posture maximaliste.
L’article
pose bien le problème même s’il renvoie indûment dos à dos la Russie et les
Etats Unis. Or, chacun a pu constater que le gouvernement russe avait pris
langue avec tout le monde, régime syrien comme opposition quand les Occidentaux
n’ont adressé la parole au président Bachar al-Assad que pour lui intimer l’ordre
de vider les lieux.
En
Libye aussi, l’Occident avait soigneusement veillé à écarter toute démarche
politique qui ne comportait pas comme préalable le départ du colonel Mouammar
Kadhafi.
Comme en Libye, les Occidentaux arment de plus en plus ouvertement les prétendus rebelles qui viennent par exemple de recevoir des missiles sol-air qui ont transité par la Turquie. Les Etats Unis s'abstiennent pour l'heure de livrer directement des armes aux "rebelles," ils procèdent indirectement comme ils l'ont souvent fait dans les opérations de subversion.
Comme en Libye, les Occidentaux arment de plus en plus ouvertement les prétendus rebelles qui viennent par exemple de recevoir des missiles sol-air qui ont transité par la Turquie. Les Etats Unis s'abstiennent pour l'heure de livrer directement des armes aux "rebelles," ils procèdent indirectement comme ils l'ont souvent fait dans les opérations de subversion.
D’e toute façon, Assad c'est déjà fini et vive l'après Assad puisque
en ce moment on voit fleurir des articles dans la presse où on parle déjà du
chef de l'Etat syrien au passé
On nous dit par exemple que:
Obama et Erdogan pour accélérer la transition en Syrie, sans Assad
ou que
le général [Manaf] Tlass appelle à "l'unité" post-Assad
on nous dit aussi
comment les Etats Unis préparent l'après-Assad
Joschka Fischer se risque à évoquer
Le Moyen Orient après Assad
Joschka Fischer est l'ancien chef du parti écologiste en Allemagne
et il a été ministre des affaires étrangères et vice-chancelier. Il s'est
reconverti dans les gazoducs, avec des émoluments qui récompensent son passage
du pacifisme au bellicisme atlantiste bon teint.
Ce qu'il pronostique n'est d'ailleurs pas très engageant et ce
qu'il y voit de plus positif, ce serait un affaiblissement de l'Iran et, par
contrecoup suppose-t-il, du Hezbollah.
En fait, c'est peu de temps après le début des troubles que
l'objectif d'écarter par tous les moyens Bachar al-Assad a été formulé, dans
des termes voisins de ceux qui avaient été employés pour le colonel Mouammar
Kadhafi.
On le sait, tout était fin prêt en occident pour traiter le cas
syrien.
Il y a juste eu quelques ratés.
Le premier raté, c'est que la population syrienne ne s'est pas
soulevée contre son gouvernement et que l'armée régulière reste globalement
unie.
Certes, il y a eu des défections d'officiers supérieurs, mais ce
n'est pas la première fois que des gens haut, voire même très haut, placés se
détournent du régime en Syrie.
Il y ensuite l'entêtement chinois et russe qui n'a pas permis
d'obtenir l'adoption d'une résolution comme en Libye. Une résolution que les
crapules coalisées contre Kadhafi avaient interprétée d'une manière pour le
moins élastique et tendancieuse. A défaut d’avoir la loi avec elles, ces
puissances font valoir la loi du plus fort.
Déjà, l'Occident avait fait en sorte que toute issue politique,
autre que sa reddition, soit refusée au pouvoir libyen.
Et puis, l'armée syrienne, si elle n'est pas la quatrième armée du
monde, possède une organisation et une puissance de feu sans commune mesure
avec ce dont disposait le gouvernement libyen. Même si son équipement est en
partie obsolète (souvenez-vous de ce pilote qui a fait défection à bord d'un
Mig 21, un avion complètement dépassé), elle est très loin d'avoir déchaîné
toute sa puissance contre les prétendus rebelles et il n'est guère douteux
qu'elle ferait payer un prix élevé aux puissances qui agresseraient la Syrie.
Je ne dis cependant pas qu'elle en sortirait victorieuse, ça me paraît quand même difficile.
Donc Bachar al-Assad n'est pas encore tombé et on voit que, à Alep
par exemple, de larges pans de la population lui sont soit fidèles, soit sont tout
simplement hostiles à cette prétendue Armée Syrienne Libre.
Tiendra-t-il ou pas? Et au-delà de sa personne, le régime
tiendra-t-i?
Franchement, qui peut le savoir?
On voit certes bien à quel défi la Syrie est confrontée, face à
des adversaires impitoyables et tenaces qu'ils s'appellent Hillary Clinton,
Alain Juppé, Laurent Fabius ou David Cameron.
Il ne leur manque qu'un alibi juridique pour s'engager plus à
fond. Faute de cet alibi, ils en ont été réduits à étrangler le pays
économiquement et à une tentative d'assassinat, qu'ils ont laissé à d'autres le
soin de revendiquer. Cette tentative a manqué sa cible même si elle a emporté
plusieurs ministres.
Ignorant cependant si le chef de l'Etat avait été touché ou s'il
était en fuite comme la presse aux ordres l'a abondamment seriné, ils avaient
néanmoins déclenché la suite du plan en actionnant les bandes terroristes à
Damas, ce qui se soldera par un échec.
Suite à cet échec dans la capitale, ils espèrent à nouveau
aujourd'hui une résolution onusienne qui leur permettrait de sanctuariser une
partie du territoire syrien et, pourquoi pas, d'y installer un gouvernement
provisoire. Tel est l'objectif poursuivi à Alep comme il l'avait été à Homs...
C'est en réalité un retour à leur plan initial, un plan qui avait
été mis en pratique avec succès en Libye mais que le gouvernement syrien avait
immédiatement compris.et s'était donné les moyens d’empêcher.
On l'espère, Alep
ne sera pas Benghazi.
Libellés : Alep, Armée Syrienne Libre, Bachar al-Assad, Benghazi, Damas, Hezbollah, Iran, Joschka Fischer, Manaf Tlass, Mig 21, Mouammar Kadhafi, Syrie
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