Syrie:opposition (s) et stratégie de résistance du régime face à l'OTAN
Joshua Landis délaisse un peu son blog Syria Comment mais il ne l’a pas fait sans le remettre entre de bonnes mains comme celles d’Ehsani
Ehsani aborde de front la question d’une intervention étrangère en Syrie et en situé l’éventualité dans le cadre du rapport de forces réel qui semble se dessiner entre le gouvernement syrien et ses opposants
Ehsani souligne que le régime syrien semble pouvoir compter sur une armée et des forces de l’ordre unies et qui lui restent fidèles en dépit de quelques défections anecdotiques En face de lui, l’opposition est morcelée et sait qu’elle n’a aucune chance de dominer la situation sans une assistance étrangère qui ne saurait être autre chose qu’une zone d’exclusion aérienne doublée d’une intervention de troupes au sol
Une démarche qu’Ehsani qualifie de suicidaire pour l’opposition et que, selon moi, les occidentaux excluent et pas seulement pour des raisons financières ou de politique intérieure Ehsani a raison de dire que la Syrie n’est ni la Tunisie, ni l’Egypte Le régime syrien diffère des régimes de Moubarak et de Ben Ali sur un point essentiel, c’est qu’il ne fait pas partie comme eux des alliés de l’Occident Et que, alors que les occidentaux, les Etats Unis pour appeler les choses par leur nom, ont pu trouver une solution interne au régime pour essayer d’amener une transition qui ne pénalise pas leurs intérêts, ils n’ont par contre aucune garantie sur ce qui pourrait se passer à Damas
En Syrie, il faudrait mener une vraie révolution et non une révolution de palais comme dans les deux autres dictatures arabes où les révolutions restent à faire, ce qu’ont bien compris les militants les plus lucides
La stratégie la plus économique, aurait été de constituer un Conseil national de Transition sur le mode libyen et de le charger, après les tapis de bombes de rigueur, d’investir telle ou telle ville, telle ou telle infrastructure
A cette fin, il faudrait que l’opposition syrienne dispose d’une base territoriale qui serait un Benghazi du pays de Cham, à partir de laquelle des « rebelles » pourraient réceptionner des armes, s’organiser dans un sanctuaire protégé par une zone d’exclusion aérienne et passer ensuite à l’offensive
Les autorités syriennes l’ont parfaitement compris et se sont employées à empêcher toute emprise territoriale de l’opposition, que ce soit dans des villes ou aux frontières Les hypothèses pour une zone d’exclusion aérienne portent sur la Syrie du nord, où des armes pourraient être acheminées des trois pays frontaliers (Irak occupé, Turquie et Liban) et pour la bonne raison que l’aviation sioniste pourrait ainsi avoir les mains libres pour agir dans la Syrie du sud, la zone qui jouxte le plateau du Golan occupé et comprend la capitale, Damas
Les Occidentaux ont une longue expérience impériale de dévastation et leur façon d’appréhender le cas syrien en tire parti, mêlant le scénario de la destruction de l’Irak à celui de la dévastation de la Libye
Ce ne sont que conjectures parce que, pour l’instant, le pouvoir syrien a réussi à empêcher, veto ou pas de la Russie et de la Chine, la création sur le terrain de conditions de nature à assurer le succès militaire à moindre coût d’une opération de l’OTAN Les occidentaux ne sont en réalité pas prêts à une nouvelle expédition qui serait à très haut risque, non seulement pour eux mais pour leur petit protégé sioniste
Reste désormais à voir comment la Syrie va supporter les sanctions économiques, onusiennes ou unilatérales (ces dernières étant des déclarations de guerre déguisées) C’est là en réalité qu’est le point faible du régime syrien et une aggravation de la situation économique pourrait miner sa base et faire basculer le pays dans une guerre civile dans le style de ce qu’a connu l’Algérie
Maintenant Bachar al-Assad a tendu la main à certains de ses opposants, une ouverture que ces derniers ont rejetée, forts du soutien que leur apportent les Occidentaux et les monarchies progressistes du Golfe ou du Maghreb
Comme en Libye, ils ont donc fait le choix de la stratégie du pire pour le peuple syrien.
Par Ehsani, Syria Comment (USA) 7 octobre 2011 traduit de l’anglais par Djazaïri
A l’approche du 7ème mois des troubles en Syrie, ce qui suit devient évident:
1- Il est peu probable que la cohésion de l’armée syrienne et de l’appareil sécuritaire vole en éclat à brève échéance. Ils est certain que des désertions ont eu lieu, mais c’est un phénomène trop sporadique pour entamer de manière significative le contrôle de l’armée sur le territoire syrien.
2 Le moment décisif de ces derniers mois est intervenu juste avant le mois de Ramadan. Hama était sur le point d’échapper au contrôle du pouvoir central. L’éventualité d’une entrée de l’armée dans Hama n’avait jamais été perdue de vue à Damas. A la fin, le risque de l’attentisme a été jugé trop important. Laisser les choses filer à Hama pendant tout le mois de Ramadan aurait rendu par la suite beaucoup plus difficiles les tentatives pour en reprendre le contrôle. Aucun des dirigeants Syriens ne voulait d’un autre Benghazi en Syrie. C’est pourquoi les blindés sont intervenus précédemment à Deraa et à Rastan tout récemment. Damas ne permettra à aucune portion du territoire d’échapper à son contrôle.
3 – Devant une armée forte et unie, qui a été capable d’exercer un contrôle complet de l’ensemble du territoire, l’opposition doit comprendre dès maintenant que vaincre le régime militairement ne pourra pas se faire sans aide étrangère. La Syrie n’est pas la Tunisie ou l’Egypte. Le soulèvement populaire qui devait balayer le régime syrien était une option séduisante en théorie. Les membres de l’opposition syrienne se proposaient de suivre cette voie. En pratique, cependant, elle n’a donné aucun résultat discernable pour l’instant.
4- Reste l’aide étrangère. Ce qui peut signifier une de ces trois choses:
· Des soldats étrangers sur le terrain
· Une zone d’exclusion aérienne
· L’armement d’organisations de l’intérieur dans l’espoir de renverser le régime militairement. .
C’est à cause cde cette dernière éventualité que les autorités syriennes font en sorte qu’aucun pouce de territoire n’échappe à leur contrôle. Une telle zone incontrôlée servirait tout bonnement de base et de destination pour les cargaisons d’armes étrangères et constituerait un Benghazi syrien. Les lots d’armement qui ont pu entrer jusqu’à présent sont arrivés de manière sporadique et en quantités trop faibles pour représenter un vrai risque stratégique pour les forces armées du pays. En fait, l’armée syrienne et les forces de sécurité ont une telle supériorité numérique et en puissance de feu qu’il semble presque impossible que cette stratégie puisse réussir en définitive. L’opposition n’a pratiquement aucune chance de vaincre l’armée, quelle que soit la quantité d’armes qu’elle pourrait obtenir unilatéralement de l’étranger.
Dans un reportage exclusive intitulé – La guerre est la seule option pour renverser le leader Syrien, le colonel Riad al-As’aad semble appeler la communauté internationale à fournir des armes aux rebelles et à imposer une zone d’exclusion aérienne. Il conclut en disant :
« Si on ne nous en donne pas, nous nous battrons à mains nues jusqu’au renversement du régime. Je dis à Bachar al-Assad, le peuple est plus fort que vous. »
Le fait est que ce colonel se rend compte qu’armer les rebelles depuis l’étranger nécessite à la fois une adresse en Syrie (Rastan ou Jabal al zawye) ET une zone d’exclusion aérienne.
Mais qu’est-ce qu’une zone d’exclusion aérienne? Le concept semble assez trompeur dans le sens que l’armée de l’air syrienne n’a pas été exactement active dans la lutte contre les insurgés avec des armes chimiques (Irak) ou d’autres chose du même genre. On peut considérer ce concept comme le prélude ou le parent pauvre de la première option qui consiste à envoyer des soldats étrangers sur le terrain. La zone d’exclusion aérienne, si elle devait être créée, impliquerait sans doute le repérage et l’affaiblissement du vaste dispositif de missiles sol-air de l’armée syrienne.
Saddam avait survécu à tout ce qu’on avait utilisé contre lui, y compris la zone d’exclusion aérienne, jusqu’à l’entrée en action de troupe au sol. Dès que cette phase est intervenue, son régime s’est tout simplement écroulé en quelques jours.
Ai le succès initial occidental a eu un effet grisant, ce qui s’est passé par la suite a été suffisant pour convaincre même les éléments les plus bellicistes de Washington qu’une répétition de cette expérimentation en Syrie ne pourrait pas être comprise aujourd’hui. Les USA n’ont pas les reins assez solides en ce moment, ni politiquement, ni militairement, ni financièrement pour une telle aventure.
Le Conseil National Syrien récemment formé se trouve devant un dilemme au sujet d’ l’intervention étrangère. Dit simplement, l’opposition sait qu’il est pratiquement impossible de renverser ce régime sans aide étrangère. Ils savent cependant aussi qu’inviter à une intervention étrangère en Syrie revient à un suicide politique. Ce qui en résulte est une réponse politique confuse et des réponses en demi-teinte.
Pour être précis, la non intervention étrangère a été la ligne partisane constant. Lors de son dernier entretien avec al Jazeera, M. Ghalioun avait appelé à des « observateurs internationaux pour aider à la protection des civils. » Quoique ça ne sonne pas comme une intervention militaire étrangère, c’est sûrement le prélude d’une intervention de ce genre. Que se passerait-il si une équipe d’observateurs internationaux (l’UNIFIL ?) se faisait tirer dessus ou tuer ? La communauté internationale devrait-elle alors envoyer de véritables forces armées pour protéger les observateurs ?
Le Conseil national Syrien va probablement tourner autour du pot et éviter de s’exprimer directement sur le sujet. C’est parce qu’il est dans une situation inextricable. Avec l’évolution de ce conflit, le temps va venir où le Conseil national Syrien sera au pied du mur et dire de manière convaincante comment il compte transformer en réalité sur le terrain le slogan « Isqat al Nizam.» (renverser le régime).
Libellés : Bachar al-Assad, Borhan Ghalioune, Congrès national Syrien, Damas, Joshua Landis, Libye, ONU, Riad al-As'aad, Syrie, zone d'exclusion aérienne
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