Tarek Aziz: la mort pour récompense
Le régime irakien vient de condamner Tarek Aziz à la peine capitale au terme de ce que Pepe Escobar qualifie de processus judiciaire de vengeance. Pepe Escobar souligne en effet que les preuves de culpabilité admises par la justice irakienne auraient été rejetées par n'importe quel tribunal occidental.
Pepe Escobar oublie peut-être le tribunal de Nuremberg et la façon dont il gérait l'administration de la preuve...
Ceci dit, Tarek Aziz était sans doute le dernier très haut dignitaire du régime baathiste encore vivant. C'en était surtout la figure la plus connue dans le monde de par ses fonctions de ministre des affaires étrangères. Les téléspectateurs ont en effet eu maintes occasions de voir son visage à l'époque de la première, puis de la deuxième guerre dites du Golfe.
Tarek Aziz, de son vrai nom Mikhael Yuhann, doit se demander comment son pays a pu en arriver là et comment, en fin de compte, le pouvoir a pu échapper, sans doute pour toujours au parti Baath.
Je ne sais pas quelle est son analyse mais, selon moi, le compte à rebours du régime baathiste n'a pas commencé avec les guerres menées par les USA et leurs amis contre l'Irak. Tout a commencé en réalité avec l'agression lancée par l'Irak contre l'Iran voisin qui venait de vivre une révolution islamique et d'abolir la monarchie.
La guerre déclenchée par le gouvernement irakien ne répondait à aucune menace du pays voisin, où la révolution n'était pas stabilisée avec un poids des ayatollahs bien moindre que ce qu'il sera par la suite. Le président Saddam Hussein avait en fait dénoncé les accord d'Alger, signés entre l'Irak et l'Iran, pour régler un différend frontalier relatif à l'embouchure des deux fleuves qui traversent l'Irak
Ce fut une guerre dure et meurtrière dont l'enjeu allait au delà bien sûr de la querelle frontalière. Le régime irakien avait pensé tenir là l'occasion d'accéder à un leadership régional, de s'affirmer comme un allié de l'occident face à l'islamisme au pouvoir en Iran, et peut être de faire main basse sur les secteurs iraniens pétrolifères limitrophes de l'Irak.
Sa démarche rencontrait l'assentiment et le soutien des monarchies arabes, qui craignaient d'être submergées à leur tour par une révolution, mais aussi des pays occidentaux. Ces derniers venaient en effet de perdre un allié de taille avec le Chah et s'inquiétaient aussi d'une contagion révolutionnaire. Et c'est pourquoi les pays occidentaux n'hésitèrent pas à renforcer l'arsenal militaire irakien, la France allant même jusqu'à "prêter" des avions de combat (sans doute avec leurs pilotes) à l'armée irakienne. Ce sont ces mêmes pays qui fourniront au régime irakien ces fameuses armes chimiques qu'ils lui reprocheront plus tard de détenir. Ces armes chimiques seront en effet utilisées contre les troupes iraniennes.
On connaît la suite: l'Irak dût accepter de revenir aux accords d'Alger. Sauf que ce n'était plus le même Irak mais un Irak appauvri, endetté auprès des pétromonarchies, à l'économie désorganisée sans parler bien sûr des nombreuses pertes en vies humaines. C'est cette situation d'après guerre qui avait incité Saddam Hussein à s'emparer de l'émirat koweïtien voisin, ce qui aboutira à la première guerre du Golfe. Là encore, Saddam Hussein peu instruit par la guerre contre l'Iran avait cru bon d'interpréter des propos d'une diplomate américaine comme un feu vert à son entreprise.
D'une manière générale, la diplomatie irakienne a toujours fait preuve d'une étrange naïveté dans ses relations avec l'Occident et les Etats Unis, ne parvenant jamais à analyser correctement la situation et les rapports de force, ni à comprendre que "l'alliance" objective avec les USA ne pouvait être que tactique et non stratégique. Que les Etats Unis ne voulaient pas d'une victoire irakienne contre l'Iran mais plutôt d'une défaite des deux pays.
L'Iran est également sortie affaiblie de son conflit avec l'Irak mais le résultat le plus important de cette guerre est qu'elle aura permis aux mollahs de consolider la révolution à leur main, en en éliminant politiquement les autres composantes. Sans la guerre, les choses se seraient peut être passées autrement.
Ce qui est par contre certain, c'est que a situation géopolitique qui prévaut actuellement dans cette sous-région s'est décidée en ce jour fatidique du 17 septembre 1980.
Pepe Escobar oublie peut-être le tribunal de Nuremberg et la façon dont il gérait l'administration de la preuve...
Ceci dit, Tarek Aziz était sans doute le dernier très haut dignitaire du régime baathiste encore vivant. C'en était surtout la figure la plus connue dans le monde de par ses fonctions de ministre des affaires étrangères. Les téléspectateurs ont en effet eu maintes occasions de voir son visage à l'époque de la première, puis de la deuxième guerre dites du Golfe.
Tarek Aziz, de son vrai nom Mikhael Yuhann, doit se demander comment son pays a pu en arriver là et comment, en fin de compte, le pouvoir a pu échapper, sans doute pour toujours au parti Baath.
Je ne sais pas quelle est son analyse mais, selon moi, le compte à rebours du régime baathiste n'a pas commencé avec les guerres menées par les USA et leurs amis contre l'Irak. Tout a commencé en réalité avec l'agression lancée par l'Irak contre l'Iran voisin qui venait de vivre une révolution islamique et d'abolir la monarchie.
La guerre déclenchée par le gouvernement irakien ne répondait à aucune menace du pays voisin, où la révolution n'était pas stabilisée avec un poids des ayatollahs bien moindre que ce qu'il sera par la suite. Le président Saddam Hussein avait en fait dénoncé les accord d'Alger, signés entre l'Irak et l'Iran, pour régler un différend frontalier relatif à l'embouchure des deux fleuves qui traversent l'Irak
Ce fut une guerre dure et meurtrière dont l'enjeu allait au delà bien sûr de la querelle frontalière. Le régime irakien avait pensé tenir là l'occasion d'accéder à un leadership régional, de s'affirmer comme un allié de l'occident face à l'islamisme au pouvoir en Iran, et peut être de faire main basse sur les secteurs iraniens pétrolifères limitrophes de l'Irak.
Sa démarche rencontrait l'assentiment et le soutien des monarchies arabes, qui craignaient d'être submergées à leur tour par une révolution, mais aussi des pays occidentaux. Ces derniers venaient en effet de perdre un allié de taille avec le Chah et s'inquiétaient aussi d'une contagion révolutionnaire. Et c'est pourquoi les pays occidentaux n'hésitèrent pas à renforcer l'arsenal militaire irakien, la France allant même jusqu'à "prêter" des avions de combat (sans doute avec leurs pilotes) à l'armée irakienne. Ce sont ces mêmes pays qui fourniront au régime irakien ces fameuses armes chimiques qu'ils lui reprocheront plus tard de détenir. Ces armes chimiques seront en effet utilisées contre les troupes iraniennes.
On connaît la suite: l'Irak dût accepter de revenir aux accords d'Alger. Sauf que ce n'était plus le même Irak mais un Irak appauvri, endetté auprès des pétromonarchies, à l'économie désorganisée sans parler bien sûr des nombreuses pertes en vies humaines. C'est cette situation d'après guerre qui avait incité Saddam Hussein à s'emparer de l'émirat koweïtien voisin, ce qui aboutira à la première guerre du Golfe. Là encore, Saddam Hussein peu instruit par la guerre contre l'Iran avait cru bon d'interpréter des propos d'une diplomate américaine comme un feu vert à son entreprise.
D'une manière générale, la diplomatie irakienne a toujours fait preuve d'une étrange naïveté dans ses relations avec l'Occident et les Etats Unis, ne parvenant jamais à analyser correctement la situation et les rapports de force, ni à comprendre que "l'alliance" objective avec les USA ne pouvait être que tactique et non stratégique. Que les Etats Unis ne voulaient pas d'une victoire irakienne contre l'Iran mais plutôt d'une défaite des deux pays.
L'Iran est également sortie affaiblie de son conflit avec l'Irak mais le résultat le plus important de cette guerre est qu'elle aura permis aux mollahs de consolider la révolution à leur main, en en éliminant politiquement les autres composantes. Sans la guerre, les choses se seraient peut être passées autrement.
Ce qui est par contre certain, c'est que a situation géopolitique qui prévaut actuellement dans cette sous-région s'est décidée en ce jour fatidique du 17 septembre 1980.
Tarek AZIZ |
L'histoire d'Aziz restera non dite
par Pepe Escobar, Asia Times 27 octobre 2010 traduit de l'anglais par Djazaïri
Les néo conservateurs ont toujours soutenu que les Etats Unis avaient envahi l'Irak pour apporter la "démocratie" (au bout du fusil). Il semble que faute de démocratie, les plus gros succès du système judiciaire américain ont bel et bien été institués dans l'Irak (qui reste occupé); la torture (comme WikiLeaks l'a amplement démontré) et la peine de mort. Vous parlez d'une libération.
Et parlons de récompense pour services rendus. L'ancien vice premier ministre Tarek Aziz, 74 ans, malade, fragile, déjà emprisonné, et victime d'une attaque cérébrale cette année, vient d'être condamné ç la pendaison par la Cour Suprême de Baddad, selon la télévision irakienne d'Etat, "pour son rôle dans l'élimination des partis islamiques [chiites]."
Aziz, né Mikhael Yuhann à Mossoul en 1936, un Chrétien de rite chaldéen - le seul dans le cercle rapproché de l'ancien pouvoir baathiste sunnite et laïque, son "visage humain" le plus connu dans le monde - diplômé en langue et littérature anglaises, purge déjà une peine de 15 ans de prison pour l'assassinat de 42 commerçants en 1992 plus une condamnation supplémentaire de sept ans pour son rôle présumé dans la déportation des Kurdes Irakiens à l'époque de Saddam Hussein. Aucun tribunal occidental n'aurait accepté ce qu'on a présenté comme des preuves de son implication personnelle dans chacun de ces crimes.
L'Union Européenne (UE) a été au moins fidèle à sa charte (la peine de mort est "inacceptable"); Catherine Ashton, la chef de la diplomatie européenne, va appeler Bagdad à ne pas exécuter la sentence. Les avocats d'Aziz vont faire appel au Vatican - qui condamne aussi la peine capitale. Le leader du parti Radical Marco Pannella a commenceé une grève de la faim pour la dénoncer.
Ne pas voir ce verdict comme politique revient à croire à la démocratie par le "choc et l'effroi." Dans ce cas précis, la vengeance est celle de l'actuel premier ministre Nuri al-maliki et de son parti chiite Da'wa qui fit l'objet de persécutions par le régime sunnite de Saddam. Sinon il n'y a que des perdants - parce que Aziz est sans doute la seule personne sur terre qui pourrait raconter la véritable histoire et toutes les délicieuses étapes de dizaines d'années du sale jeu des Etats Unis en Irak.
C'est le suprême best-seller politique que nous aurons jamais l'occasion de lire - nous disant par exemple comment le Royaume Uni, les Etats unis et l'Arabie Séoudite ont dépensé 60 milliards de dollars pour que l'Irak entre en guerre contre l'Iran dans les années 1980; ce qui a été réellement discuté entre Saddam Hussein, lui-même et l'ancien secrétaire à la défense US Donald Rumsfeld lors de leur rencontre de 1983 à Bagdad; comment chaque politicien Occidental rendait hommage à la cour de Saddam - l'homme qui devait éliminer ces ayatollahs déments; comment Saddam a vaincu les vagues humaine de martyrs de feu l'ayatollah Khomeini en répandant des armes chimiques fournies par l'Occident; et comment ces "armes de destruction massive" imaginaires n'existaient plus depuis 1995 au moins - ce qui rendait le casus belli de Tony Blair et George Bush nul et non avenu.
Quand l'US Marine Corps est entré à Bagdad le 9 avril 2003, sa villa a été pillée - par les marines et par des pillards locaux. Je suis allé voir cette aussi vite que possible (A (mis)guided tour of Baghdad Asia Times Online, 18 avril 2003), découvrant une boîte de DVD de la saga du "Parrain" - la préférence de Saddam allait pour le premier film de la saga - juste à la porte. Le 24 avril, Aziz se rendait aux Américains. Il était le huit de pique de l'infâme jeu de cartes du pentagone (Saddam était l'as de pique).
L'histoire jugera peut-être que Blair et Bush - avec leur Moloch technologique terrifiant baptisé "choc et effroi" - n'ont pas été meilleurs que le cercle rapproché de Saddam Hussein et que, directement et indirectement, leurs "politiques" ont tué plus de civils Irakiens que Saddam ne l'a jamais fait. Pourtant ils ont publié (Blar) et vont publier (Bush) des livres à leur propre "gloire".
Aziz est par contre le seul qui reste et a une histoire à couper le souffle. Et comme l'homme qui en sait trop dans le proverbe, il doit être éliminé.
Libellés : Bagdad, Catherine Ashton, George W. Bush, guerre du Golfe, guerre Iran-Irak, Irak, Iran, Marco Pannella, Nuri al-Maliki, Pepe Escobar, Saddam Hussein, Tarek Aziz, Tony Blair
1 Comments:
Tout cela est bien triste... mais il faut dire qu'à trop jouer avec le feu.... C'est le prix du pacte avec le diable...
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