Philip Roth s'attaque au tabou auquel ne touchera pas Charlie Hebdo
Charlie
Hebdo vient de publier de nouvelles caricatures représentant le prophète de l’Islam.
Je ne vais pas gloser longtemps là-dessus parce que si de nombreux clients sont tombés
dans le panneau en se ruant, dit-on, dans les kiosques pour s’en procurer un
exemplaire, les commentateurs portent cette fois un jugement plus mitigé sur la politique éditoriale de ce magazine . J’écoutais en effet tout à l’heure sur France
Info une petite brochette de commentateurs évoquer un coup marketing dénué de l’esprit
de responsabilité qui doit caractériser la profession journalistique.
Mais
Charlie Hebdo aurait tort de se gêner vu que c’est si facile de taper sur les
Musulmans en France, une «communauté» [selon moi il n'y a pas ou pas encore de communauté musulmane] encore fortement marquée par l’appartenance
au prolétariat voire par la pauvreté , objet du discours politique mais non représentée politiquement.
Le
magazine a mis la barre très bas. Pour montrer son courage, je lui propose de mettre la barre très haut et de s’attaquer avec virulence et détermination aux véritables tabous de cette
société, par exemple l’holocauste, l’Etat prétendu juif ou encore le rôle des
dirigeants Juifs Français pendant l’occupation et sous le régime de Vichy
(parce qu’il y avait les Juifs résistants avec de Gaulle et dans les maquis
mais il y avait aussi les autres).
C’est
pas demain la veille, parce que Charlie-Hebdo se retrouverait cloué au pilori
et rapidement privé de ressources financières.
Par Matthew Hays, The Globe & Mail
(Canada) 25 août 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri
Phillip Roth an parle comme d'un des moments
les plus marquants de son enfance. C'était en 1978, et le cinéphile de 12 ans a
regardait la cérémonie de remise des Oscars à la télévision quand VanessaRedgrave a dénoncé les «voyous sionistes» tout en acceptant son Oscar pour le
meilleur second rôle féminin.
«Ce discours a eu un impact énorme sur moi»,
dit Roth, un cinéaste basé à Los Angeles (qui n’a pas de rapport avec le
romancier du même nom). "C'était probablement la première fois que je réalisais qu'il
y avait des gens, pas seulement des terroristes, qui étaient vraiment critiques à l’égard d'Israël." Le discours
mémorable de Redgrave avait été accueilli par des huées et des sifflements
lors de la cérémonie, et sa co- vedette dans Julia, Jane Fonda, avait reçu une standing ovation.
Philip B. Roth |
Roth, qui a grandi dans une famille juive à
Los Angeles, explique que les questions qui entourent la relation de la communauté
juive américaine à Israël continuent de le fasciner – l’une d’entre elles en
particulier. "Les Juifs américains ne sont pas vraiment autorisés à dire
quoi que ce soit de critique sur Israël", soutient-il. "Si vous
regardez la presse israélienne, il ya un débat vigoureux, qui se poursuit sans
interruption. Les Israéliens sont autorisés à être très critiques envers
Israël. Les Américains, semble-t-il, ne le sont pas. Parmi mes amis et ma
famille, je pouvais trouver des gens qui étaient très ouverts sur tous les
sujets imaginables, sauf quand on touchait à Israël et au Moyen-Orient. "
Roth d’ajouter, «Quand le sujet arrivait sur
Israël, c'était presque comme si la discussion était coupée."
Ce constat a incité Roth à réaliser son
propre documentaire à la première personne sur ce sujet ; le résultat est
un mélange grisant de considérations personnelles et politiques. Les
Confessions d’un Juif Honteux, qui sort en première mondiale ce weekend au
Festival Mondial du Film de Montréal et traite de l’itinéraire de Roth dans sa
confrontation avec l’écheveau complexe de liens personnels, historiques et
politiques que la diaspora juive possède avec l’Etat d’Israël.
Rorh a interviewé un grand nombre de
personnes pour son documentaire – de sa propre grand-mère à Phyllis Chesler,
auteure du livre The New Anti-Semitism, dans lequel elle avertit de la montée
inquiétante du préjugé antijuif au début du 21ème siècle. Les
résultats sont fascinants et Roth prend soin de donner longuement la parole à
ceux avec qui il est en désaccord.
Il reconnaît que certains l’ont critiqué pour
avoir entrepris un tel projet. «Je suis un homosexuel qui enseigne le yoga à
des apprenants tout nus à Los Angeles. Je ne suis jamais allé au Moyen Orient.
Mais j’ai vraiment aimé l’idée que quelqu’un comme moi, qui n’a rien d’un
spécialiste, puisse se pencher sur ces questions et les poser très franchement.
Après tout, deux tiers des Juifs Américains ne sont jamais allés en Israël.
Mais si nous nous interrogeons sur les relations et le soutien de notre
gouvernement à Israël, nous sommes taxés de [Juifs] honteux.»
Au cours de ses recherches pour Confessions d’un
Juif Honteux – qu’il appelle le fruit de «cinq ans de travail de l’amour» - il
s’est découvert des affinités particulières avec une des personnalités historiques
dont il retrace l’histoire. «Hannah Arendt, elle-même survivante des camps
nazis [Hannah Arendt n’a jamais séjourné dans un camp nazi, note de Djazaïri],
avait écrit des textes assez critiques du sionisme après le jugement d’Adolf
Eichmann. Elle avait été alors accusée d’être une juive honteuse simplement
parce qu’elle soutenait que la vision initiale du sionisme s’était égarée.
Vers la fin du film, Roth se retrouve
plaidant pour une version de la solution controversée à un seul Etat dans
lequel Israéliens et Palestiniens vivraient dans le même pays, avec une
personne, un vote. Une des personnes qu’il interviewe conteste fermement cette
idée en affirmant qu’un tel système signifierait un «suicide national pour
Israël. =»
Roth soutient que, «Tant que vous avez autant
de colonies juives en Cisjoordanie, tant que vous donnez aux Russes et aux
Américains et à d’autres immigrants autant d’incitations financières pour vivre
là-bas, et tant que vous avez des palestiniens condamnés à la pauvreté qui
vivent à côté d’eux, je pense que vous devez accorder à ces Palestiniens le
même accès à la citoyenneté, mais si vous ne le faites pas, alors c’est
vraiment comme l’apartheid.»
Et il concède qu’il y a une certaine ironie de
voir Confessions of a Self-Hating Jew projeté en première mondiale au Canada où
le gouvernement conservateur s’est avéré être un chaud partisan d’Israël.
«Je ne prétends pas que les sionistes vont entrer
dans la salle de cinéma et que leur mentalité sera changée par mon film», dit
Roth. "Mais nous devons en parler. Ces politiques de construction de
nouvelles colonies en Cisjordanie: sont-elles vraiment dans l’intérêt d’Israël?
N'ont-elles pas tout simplement créé une situation impossible?
Libellés : Adolf Eichmann, caricature, Charlie Hebdo, entité sioniste, Hannah Arendt, Jane Fonda, nazisme, Philip Roth, Vanessa Redgrave
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home