mercredi, mars 09, 2011

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Mission N°77: vous commettrez un massacre dans une église d'Alexandrie

Les journaux français sont au courant de cette affaire, mais au moment où j'ai décidé de traduire ce papier du Miami Herald, Libération était semble-t-il, le seul à en parler en détail mais en accès payant. Personnellement, il y a longtemps que j'ai décidé de ne plus donner un sou à un journal français (à part le Progrès de Lyon le dimanche, c'est une habitude dont il est plus difficile de se débarrasser que de l'addiction au tabac).
Comme on le sait, des manifestants dans plusieurs villes égyptiennes ont investi des locaux de la police politique du régime de Hosni Moubarak et se sont emparés de quantités de documents jusque là confidentiels et qui circulent maintenant sur internet. Des militants ont même pu avoir en main leur dossier personnel dans lequel ils ont été surpris de découvrit l'efficacité de la surveillance opérée par le régime qui s'intéressait même à leur vie familiale.
En cela, la Sécurité d'Etat égyptienne ne se différencie pas d'autres services du même genre comme les ex renseignements la DRS en Algérie, les ex Renseignements Généraux en France. Certains seraient en effet surpris de savoir combien de personnes sont fichées en France (oui, ces millions) avec des dossiers comportant des informations de l'ordre de la vie personnelle et familiale, plus des photos bien entendu. La grande différence est surtout que les services français ne pratiquent pas (plus) la torture et l'arrestation arbitraire.
Et ce que les manifestants ont sorti des locaux de la Sécurité d'Etat est absolument explosif, ravalant le Watergate ou l'affaire des écoutes de l'Elysée au rang de simples faits divers.
On y apprend notamment que l'attentat contre l'église d'Alexandrie perpétré au tout début de cette année et attribué à la nébuleuse intégriste islamique a toutes chances, comme d'autres crimes du même genre, d'être l'œuvre de cette officine du ministère de l'intérieur de Hosni Moubarak.
Et croyez moi si vous voulez, mais des attentats ou des attaques de ce genre visant les Coptes, il y en aura d'autres car les suppôts de la dictature et autres ennemis de l'Egypte n'ont pas désarmé et ils sont bien déterminés à essayer de plonger ce pays dans le chaos. Espérons simplement que le peuple égyptien saura déjouer ce piège mortel qui lui est tendu.

par HANNAH ALLAM et MOHANNAD SABRY McClatchy Newspapers-Miami Herald (USA) 7 mars 2011 traduit de l'anglais par Djazaïri


Moins d'un mois après l'éviction de Hosni Moubarak, le gouvernement intérimaire égyptien fait face à une nouvelle crise: ce qu'il faut faire des milliers de documents que les manifestants ont saisi dans les bureaux de l'Agence de la Sécurité d'Etat au cours du weekend.

L'autorité intérimaire dirigée par les militaires a exigé que les dossiers classifies conserves par le redouté service de sécurité intérieure de Moubarak soient restitués. Au lieu de quoi, ils ont été dispersés dans toute l'Egypte, avec des documents qui circulent en permanence sur Facebook et Twitter, obligeant le gouvernement à y répondre et soulevant des craintes parmi certains militants de voir leur valeur réduite dans le cadre de futures poursuites pour torture et enlèvement.

Certaines des choses continues dans les documents sont salaces et sinistres.

Un fichier contiendrait une vidéo supposée montrer une relation sexuelle entre une princesse Koweitienne et un homme d'affaires Egyptien. Un autre présente la plus haute autorité religieuse d'Egypte comme un coureur de jupons.
Israa Abdel Fattah, 32ans, une syndicaliste et blogueuse, a partagé le dossier qui la concerne avec McClatchy et a été stupéfaite de la précision de la surveillance. Le dossier contenait des transcriptions détaillées de courriels expédiés depuis son compte Gmail et de conversations téléphoniques avec son ex mari. La sensation de viol de ma vie privée a été indescriptible, dit-elle.
"Je savais qu'ils me surveillaient, mais je n'aurais jamais imaginé qu'ils avaient toutes ces informations sur moi," dit-elle. « Mes amis ont essayé de me sortir pour dîner cette nuit là. Ils ont essayé de me faire rire, mais c'était impossible. Je leur ai dit que je voulais être seule, alors j'ai pris mon dossier e je suis rentrée à la maison. »

Le document sans doute le plus controversé à émerger est celui qui tend à montrer l'implication de la Sécurité d'Etat dans un attentat à l'explosif contre une église d'Alexandrie le jour du Nouvel An. L'attentat avait causé la mort de 21 personnes et en avait blessé 80, le pire acte de violence contre la minorité chrétienne Copte d'Egypte depuis plus d'une dizaine d'années.
La véracité du document n'a pas été établie avec certitude, mais sa publication a déclenché des manifestations de centaines de Chrétiens Coptes ce dimanche au Caire.
Les Coptes, spécialement ceux d'Alexandrie, avaient soupçonné l'implication des autorités dans l'attentat, et avaient observé que la sécurité renforcée qui était supposée protéger l'église avait disparu un peu avant l'explosion de la bombe.
D'après ce document, un des huit dont ont dit qu'ils parlent d'attaques contre des églises, la Sécurité d'Etat s'est servi d'un prisonnier islamiste pour participer à l'organisation de l'attentat, dont le recueil de détails sur les issues pour entrer et sortir de l'église. Le document était daté du 2 décembre 2010 et était adressé au ministère de l'intérieur. Il parlait de l'attentat contre l'église comme de la mission N°77.

Georgette Qilini, une Copte qui a été élue au parlement égyptien, affirme que le ministère de l'information de Moubarak avait ordonné aux chaînes de télévision de cesser de l'inviter après qu'elle ait émis en direct l'hypothèse que la Sécurité d'Etat était mêlée à l'explosion.
"Elle était peut-être impliqué," a declaré Qilini ce lundi. « Nous avons inspecté l'église après l'incident et nous n'avions pas cru à la version officielle. Il y a encore beaucoup, beaucoup de questions, mais je n'ai aucun document. »
Il existe aussi plusieurs dossiers qui étayent la réputation de tortionnaires d'agents de la Sécurité d'Etat. Dans une lettre de 2008 portant le cachet « top secret » et publiée sur Facbook, un haut fonctionnaire écrivait que les détenus souffraient de « blessures » lors de leur détention par la Sécurité d'Etat. Il se plaignait que les interrogatoires devaient être retardés dans l'attente de la guérison des blessures.
Les questions abondent. Pourquoi par exemple, un complot aussi grave que l'attentat contre l'église aurait-il été présenté dans un document découvert aussi vite ? Pourquoi certains documents ont-ils été passés à la broyeuse et d'autres non ?
Presque tous les documents sont à l'entête de la Sécurité d'Etat et portent la signature d'officiers supérieurs.
Les officiers de l'armée qui étaient sur place quand les manifestants ont déboulé dans les quartiers généraux de la Sécurité d'Etat au Caire et dans d'autres villes ont essayé de récupérer les documents, bataillant avec les foules pour certains d'entre eux. Un haut magistrat a pris possession de certains autres.
Un message ce dimanche sur la page Facebook du Conseil Suprême des Forces Armées, qui dirige actuellement le pays, a ordonné à quiconque est en possession des documents de cesser leur publication et de les livrer immédiatement au poste militaire le plus proche. Le Conseil a évoqué des préoccupations liées à la sécurité nationale.
Des militants et des défenseurs des droits de l'homme craignent que la disparition des dossiers puisse nuire aux chances qu'un nouveau gouvernement civil puisse poursuivre des responsables pour les abus commis par la Sécurité d'Etat.
"C'est une chance unique pour qu'ils [les agents de la Sécurité d'Etat] répondent de leurs actes, mais dans la mesure où l'accès aux documents n'a pas été conforme à une procédure [judiciaire] définie, c'est problématique, » explique Heba Morayef, chercheur au bureau du Caire de Human Rights Watch. « Certains sont entre les mains d'organisations militantes assez responsables, mais d'autres se retrouvent un peu partout. »
Les manifestants ont plaidé en faveur de la saisie des documents, affirmant que l'autorité intérimaire ne les avait pas mis en sécurité et qu'ils étaient menaces d'être perdus ou détruits s'ils ne les avaient pas pris. Comme s'il confirmait cette thèse, le procureur général d'Egypte a ordonné lundi l'arrestation de 47 agents de la Sécurité d'Etat pour leur implication dans la destruction de documents.

Ce lundi, les manifestants n'avaient rien fait pour arrêter la publication. Ils ont constitué une banque de données en ligne genre WikiLeaks pour les documents qu'ils ont posté sur Facebook et ailleurs.

Abdel-Fattah a été choquée par ce que des amis lui ont transmis alors qu'elle attendait samedi près de l'entrée du complexe de la Sécurité d'Etat au Caire.
Elle avait été arrêtée en 20078 après l'appel à la grève générale qu'elle avait lancé pour attirer l'attention sur les sort des travailleurs Egyptiens. Ce luundi, elle a fourni à McClatchy des éléments de son dossier dont 16 pages de courriers électroniques qu'elle avait envoyés et reçus sur son compte Gmail, et un résumé d'une conversation de deux heures qu'elle avait eue via le service téléphonique basé sur Skype.
Une photo d'elle souriante était fixée à un des documents.
Le premier lot de documents reçu par Abdel-Fattah concernait un échange par courier électronirque qu'elle avait eu avec une Américaine du National Endowment for Democracy, une organisation à but non lucratif basée à Wahington et financée par les Etats Unis, qui promeut la démocratie dans le monde. L'organisation l'avait invitée à animer une discussion via Skype sur les activités en faveur de la démocratie menées par des jeunes.
Abdel-fattah avait accepté, alors l'agent de la Sécurité d'Etat qui surveillait ses courriers électroniques avait recommandé la coupure de sa connexion internet au moment prévu afin d'empêcher sa participation, selon les documents.
"J'ai d'abord ri," declare Abdel-Fattah. "Comme c'est stupide de leur part de penser que couper ma connexion internet pourrait m'arrêter. J'avais toujours la possibilité d'aller chez des amis pour utiliser internet. »
Puis elle a parcouru ses conversations très personnelles par téléphone et courrier électronique avec son ex mari. Son militantisme, son activité professionnelle et sa vie privée, tout était mis à nu, avec des indications sur les endroits où se trouvaient des copies de sauvegardes des documents.
Elle est rentrée chez elle démoralisée. Puis elle a pris rendez-vous pour la fin de semaine avec un avocat pour discuter de la constitution d'un dossier contre les agents dont les noms apparaissent dans son dossier.

(Sabry est correspondant particulier pour McClatchy)

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posted by Djazaïri at 11:46 PM

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